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La fracture cachée … pénurie, opulence, croissance : Jean Baudrillard

Mercredi, septembre 16th, 2009

un copier/coller :
www.nouvelobs.com/articles/p2144/a289599.html
Les débats de l’Obs (décembre 2005)
La fracture cachée
Pour le philosophe, les élites politiques prétendent parler au nom du peuple sans rien savoir de lui. Et le fossé est devenu plus radical qu’on ne l’imagine.
L’Europe virtuelle, celle des flux financiers, des marchés, des grands travaux, de la culture, celle-là fonctionne au fond très bien, telle qu’elle a été conçue au sommet. L’erreur a été de vouloir lui donner, avec le référendum sur la Constitution européenne, l’aval des populations réelles, au lieu de la maintenir dans une sphère abstraite, en la faisant ratifier par les Parlements, ces fantômes de service.
Les peuples marchent vaille que vaille, pourvu qu’on ne leur demande pas leur avis. L’erreur a donc été de vouloir en appeler à une « réalité démocratique ». Double erreur en fait : d’abord, celle de n’avoir pas compris que cette « réalité démocratique » n’existe plus – la « réalité » en général n’existe qu’aussi longtemps qu’elle n’a pas été doublée par les modèles. Et les hommes politiques, eux-mêmes doublés par leur image et ne jouissant plus que d’un pouvoir virtuel, devraient être bien placés pour le savoir. Mais cette doublure a lieu partout aujourd’hui : toutes les opinions sont doublées par les sondages, les événements par l’information, et l’Europe elle-même a été anticipée par son modèle (Bruxelles). Dans ces conditions, plus question d’en appeler à une « réalité de base » pour justifier une opération au sommet – sinon par un maquillage de circonstance via le suffrage universel. Et c’est cette opération qui a échoué.
Car – et c’est là la deuxième erreur – les peuples ne savent pas ce qu’ils veulent (inutile et dangereux donc de les interroger, mieux vaut parler en leur nom, c’est ça la « démocratie »). Par contre, ce dont ils ne veulent pas, c’est qu’on leur administre quoi que ce soit d’en haut, même si c’est « pour leur bien ». Que peut-on exiger d’un peuple virtualisé par les sondages, séquestré dans les statistiques, harcelé par les médias, que peut-on en attendre sinon de secouer ce joug, cette nouvelle servitude, et d’opposer à cette prise d’otage virtuelle un non aussi inexplicable qu’imprévisible ?
Non seulement le forcing pour le oui a joué en sens inverse, mais toutes les forces d’inertie qui jouent habituellement dans le sens de l’ordre, de la résignation et du conformisme ont elles aussi déjoué les prévisions. Et ceci est le signe d’une fracture beaucoup plus profonde que celle d’un simple ressentiment social ou économique. Derrière ce non, il y a un autre signe caché, une sorte de réaction instinctive à une forme de domination exclusive – intelligentsia et nomenklatura réunies.
A une forme d’arrogance « démocratique » au moins égale à celle de l’aristocratie de l’Ancien Régime, et qui donne d’ailleurs les mêmes signes d’anachronisme et de ridicule que la caste féodale des ci-devant. Et qui laisse présager les mêmes convulsions, venues, comme à la veille de la Révolution, du même désaveu radical d’un ordre où personne ne se reconnaît plus, ne laissant place qu’à la perpétuation d’une scène politique en pleine décomposition.
On a voulu parler de « fracture sociale », mais c’est d’autre chose qu’il s’agit. Tout le monde est bien content (même les partisans du non) de renvoyer ce non à une récrimination sociale et économique (quand on ne le disqualifie pas purement et simplement comme national-populisme) : le « peuple » voudrait sa part de gâteau, ou bien il voudrait de la transparence… Foutaises. Le Peuple s’est accommodé depuis longtemps de la corruption de ses « élites », de leur éloignement dans la plus parfaite méconnaissance de son exigence silencieuse.
Il ne sait d’ailleurs pas ce qu’il veut, mais ce qu’il sait obscurément, c’est que l’objectif premier est de le tenir à distance en le circonscrivant dans le « social ». Les élites, elles, ne vivent pas dans le social, elles vivent dans une complicité héréditaire – la féodalité en politique étant génétiquement transmissible.
Où est-on allé chercher que l’exigence profonde était celle du social et de l’économique, et que toute réaction soudaine ne pouvait venir que de là ?
C’est selon la même pensée réductrice qu’on a vu dans le « terrorisme international » l’expression de la misère et de l’exclusion des pays sous-développés. La véritable arrogance, c’est cette assignation de la révolte à de misérables causes « objectives », sociales, économiques, celles qu’on peut faire entrer dans une stratégie conventionnelle de diversion et de manipulation. C’est refuser à la révolte tout autre statut que celui de la revendication. Le coup de force du capital, c’est d’avoir tout inféodé à l’ordre de l’économie. Aujourd’hui, on est passé d’un ordre à un autre, et le social est révolu.
Le déplacement de tous les problèmes sur l’économique fait qu’ils sont virtuellement solubles. Potentiellement tout nous est donné, ou le sera, par la grâce d’une croissance et d’une accélération continues. Levée universelle des interdits, disponibilité de toute l’information, obligation de jouir. Et dans cette péripétie, c’est tout le dispositif mental et matériel de la modernité qui bascule. Car tout s’ordonnait jusque-là sur la tension entre les besoins et leur satisfaction, entre le désir et son accomplissement, les moyens étant toujours largement en deçà des aspirations. Situation critique qui a généré tous les conflits historiques que nous connaissons – revendications, révoltes, révolutions. Aujourd’hui, la réalisation immédiate dépasse de loin la faculté de jouissance d’un être humain normal. Or rien ne dit que l’homme, une fois sorti d’une pénurie millénaire, devienne porteur d’un désir insatiable, rien ne dit qu’une fois sorti d’une servitude millénaire, il devienne disponible pour une libération totale. Rien n’est moins sûr.
Et c’est là qu’est désormais la véritable fracture, non pas sociale mais symbolique : dans la satiété, dans la saturation, dans une réalité intégrale qui absorbe toutes les velléités de dépassement, de rêve ou de révolte.
Cela donne une situation originale et sans doute inouïe : le passage d’un ordre politique à un ordre symbolique bien plus radical. Ce à quoi nous succombons, ce n’est plus à l’oppression, à la dépossession, à l’aliénation, c’est à la profusion. C’est au pouvoir de ceux qui décident souverainement de notre bien et nous accablent de tous les bienfaits – « sécurité prospérité convivialité » – et par là même nous écrase d’une dette infinie, qui ne pourra jamais être rachetée.
Il nous est difficile de concevoir un niveau symbolique où l’être se rétracte et se révolte du fait qu’il lui soit trop donné. Si le manque et la servitude caractérisaient les sociétés antérieures, c’est l’opulence et le libéralisme qui caractérisent la nôtre, entrée en phase terminale et vouée aux soins intensifs.
Nouveau défi, nouvelle donne : à ce point, la révolte change de sens, elle ne vise plus l’interdit, elle vise la permissivité, la protection, la transparence excessive, l’Empire du Bien. Désormais il faut se battre contre tout ce qui vous veut du bien. Quelque part, le non au référendum, ce non illogique et insaisissable, joue de la même exigence : celle de ne pas être pris en otage par quelque modèle que ce soit (surtout s’il est idéal !) parce qu’il cache toujours un dispositif totalitaire absolument meurtrier, un intégrisme sans appel.
L’événement du non au référendum, c’est l’apparition soudaine d’un déni, d’un refus qui ne fait pas exactement opposition, mais serait plus proche d’une divergence profonde, d’une dénégation, tenace et silencieuse, de tout un ordre mondial – celle qui fait dire à Bartleby de Herman Melville : « I would prefer not to » – j’aimerais mieux pas – je ne joue pas à ce jeu-là.
J.B.

Né en 1929, Jean Baudrillard , sociologue et philosophe, est le grand théoricien de la postmodernité. Il est l’auteur notamment de « la Société de consommation » (1970), « La guerre du Golfe n’a pas eu lieu » (1991).
Dernier livre paru : « Cool Memories V » (Galilée, 2005). Les Cahiers de L’Herne lui ont rendu hommage en février dernier.
« Justifier la guerre ? », par Gilles Andréani et Pierre Hassner, Presses de Sciences-Po, 364 p., 20 euros.

Aude Lancelin Marie Lemonnier
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http://fr.wikipedia.org/wiki/Jean_Baudrillard

Comptabilité

Mercredi, août 5th, 2009

http://www.jfklibrary.org

http://en.wikipedia.org/wiki/Robert_F._Kennedy

… Kennedy stood on a platform of racial and economic justice, non-aggression in foreign policy, decentralization of power and social improvement. A crucial element to his campaign was an engagement with the young, whom he identified as being the future of a reinvigorated American society based on partnership and equality. A good idea of his proposals come from the following extract of a speech given at the University of Kansas.

… Our Gross National Product, now, is over $800 billion dollars a year, but that Gross National Product – if we judge the United States of America by that – that Gross National Product counts air pollution and cigarette advertising, and ambulances to clear our highways of carnage. It counts special locks for our doors and the jails for the people who break them. It counts the destruction of the redwood and the loss of our natural wonder in chaotic sprawl. It counts napalm and counts nuclear warheads and armored cars for the police to fight the riots in our cities. It counts Whitman’s rifle and Speck’s knife, and the television programs which glorify violence in order to sell toys to our children. Yet the gross national product does not allow for the health of our children, the quality of their education or the joy of their play. It does not include the beauty of our poetry or the strength of our marriages, the intelligence of our public debate or the integrity of our public officials. It measures neither our wit nor our courage, neither our wisdom nor our learning, neither our compassion nor our devotion to our country, it measures everything in short, except that which makes life worthwhile. And it can tell us everything about America except why we are proud that we are Americans.[27]


Le 18 mars 1968, quelques semaines avant son assassinat, Bob Kennedy prononçait, à l’université du Kansas, le discours suivant :
« Notre PIB prend en compte, dans ses calculs, la pollution de l’air, la publicité pour le tabac et les courses des ambulances qui ramassent les blessés sur nos routes. Il comptabilise les systèmes de sécurité que nous installons pour protéger nos habitations et le coût des prisons où nous enfermons ceux qui réussissent à les forcer. Il intègre la destruction de nos forêts de séquoias ainsi que leur remplacement par un urbanisme tentaculaire et chaotique. Il comprend la production du napalm, des armes nucléaires et des voitures blindées de la police destinées à réprimer des émeutes dans nos villes. Il comptabilise la fabrication du fusil Whitman et du couteau Speck, ainsi que les programmes de télévision qui glorifient la violence dans le but de vendre les jouets correspondants à nos enfants. En revanche, le PIB ne tient pas compte de la santé de nos enfants, de la qualité de leur instruction, ni de la gaieté de leurs jeux. Il ne mesure pas la beauté de notre poésie ou la solidité de nos mariages. Il ne songe pas à évaluer la qualité de nos débats politiques ou l’intégrité de nos représentants. Il ne prend pas en considération notre courage, notre sagesse ou notre culture. Il ne dit rien de notre sens de la compassion ou du dévouement envers notre pays. En un mot, le PIB mesure tout sauf ce qui fait que la vie vaut la peine d’être vécue »

(Extrait de l’empire du moindre mal de Jean-Claude Michéa, page 117)

Dette, comment la cacher : astuce n° 5674

Vendredi, juillet 31st, 2009

Que deviendrais le pays sans l’imagination de nos technocrates ?

http://www.objectifliberte.fr/2009/07/breves-pas-trop-joyeuses.html

« La SFEF, « Société de Financement de l’Economie Française », est une structure mixte créée en catastrophe à la fin de l’année 2008 pour, selon le gouvernement, apporter des liquidités aux banques pour qu’elles financent l’économie.

La SFEF émet une dette garantie par l’état et reprête aux entreprises avec une ressource moins coûteuse que s’il avait fallu emprunter sans la garantie publique. Cela ne vous rappelle rien ? Mais oui, Fannie Mae et Freddie Mac fonctionnaient comme cela, même si la destination des prêts n’était pas la même !

De fait, les ratios financiers de la SFEF laissent songeurs:

Le machin n’a pas de site web officiel – la transparence, c’est dépassé — on sait donc … »

http://www.objectifliberte.fr/2009/07/breves-pas-trop-joyeuses.html

Taille d'été

Lundi, juillet 20th, 2009
« Frappée par la crise, la ville de Flint décide de raser des quartiers entiers 16 juin 2009
Flint, le berceau de la General Motors, a déjà perdu la moitié de ses habitants. La ville a décidé de reconcentrer sa population et de raser des quartiers entiers qui seront rendus à la nature. L’administration Obama a approché les promoteurs de cette opération, qui sont désormais chargés d’appliquer leurs méthodes de « réduction urbaine » à une cinquantaine de cités touchées par la crise, au nombre desquelles Detroit, Philadelphie, Pittsburgh, Baltimore et Memphis. Sinistrée par le déclin de l’industrie, Flint veut désormais promouvoir une politique d’auto défense : elle va ancrer son développement dans des activités de service non délocalisables. … »

http://contreinfo.info/article.php3?id_article=2764